La ville de Shaka-Kandarec est transformée en un vaste parc ethnologique. Deux peuples s'y partagent le territoire : les anonymes et les sentinelles. Les premiers vivent sur l'asphalte et les parkings désaffectés. C'est une secte née en réaction à une société individualiste qui basait tout sur l'identité personnelle. Ils se caractérisent par leur refus de toute singularité individuelle et leurs rapports sont définis par un corpus d'observances strictes. Les noms sont interdits ainsi que les liens familiaux et conjugaux. Chacun se peint des lignes noires identiques sur le visage pour le rendre indifférenciable. La règle est de ne jamais dévisager son interlocuteur. Il faut réduire son champ de vision à l'extrême ou baisser sa tête vers le sol. Dans les échanges de langage, les tics sont évités. Les voix sont monocordes, détimbrées comme dans une pièce Nô. Les partisans de ces pratiques sont convaincus que seuls l'anonymat et l'absence de repère peuvent encore sauver le monde.